Les brèves de 2024 sur l'électrosmog - Pierre Dubochet

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Voici des informations qui ne justifient pas l'ouverture d'une page
© Pierre Dubochet, ing. radio
toxicologie des RNI
mis à jour le 8 avril 2024

CIRC | La réévaluation du risque des radiofréquences reportée

8 avril 2024 | Lors de l'évaluation précédente de mai 2011, environ vingt-cinq experts de quatorze pays réunis par le CIRC avaient classé presque à l’unanimité le rayonnement à haute fréquence parmi les agents «cancérigènes possibles pour l’homme» (groupe 2B). Martin Röösli a voté pour cette classification.
La question d'une mise à jour de cette évaluation est pendante depuis plusieurs années parce que de nombreux chercheurs d’envergure internationale considèrent qu’une nouvelle évaluation doit avoir lieu.*
Un changement de classification aurait des conséquences gigantesques sur l’industrie active dans les technologies radio, soit en tant que blanc-seing, ou au contraire en limitant plus sévèrement les possibilités d'exposition. Elle pourrait impacter plus ou moins fortement le secteur des téléphones mobiles, qui a vendu 1,23 milliard d'exemplaires en 2023.
Samsung et Apple pourraient être particulièrement impactés par une élévation de la catégorie du risque en «probablement cancérogène pour l’homme» ou pire encore, «agent cancérogène pour l’homme», chacun ayant environ un milliard d'utilisateurs, le premier avec 22% du marché planétaire du smartphone, le second avec 17% ces dernières années.
En décembre 2022, j'avais indiqué (ouvre un nouvel onglet) que le CIRC allait bientôt réévaluer le risque de cancérogénicité des radiofréquences. «Peut-être...» avais-je ajouté, avec trois points de suspension, tant ces évaluations semblent difficiles à planifier pour une multitude de raisons pas toujours très claires. Il était alors question d'une réévaluation durant l'année 2024, au cours des mois de mars, de juin ou d'octobre.
La date, un temps fixée pour le printemps 2025, a été reportée récemment au profit de la réévaluation d'autres substances. C'est ainsi que des produits liés à l'essence notamment seront discutés du 25 février au 4 mars 2025.
La plus récente information du CIRC laisse entrevoir que l'évaluation des radiofréquences pourrait être agendée en 2026, par exemple en juin ou en novembre, mais aussi dans un terme encore plus lointain. Des discussions ont lieu en ce moment. Pendant ce temps, les technologies radio continuent d'envahir nos espaces.
* Voir «Justification»; «Tableau 1, priorités élevées»; «radiofréquences». En 2019, le groupe consultatif déclarait: «Il est conseillé de procéder au cours de la deuxième moitié de la période de cinq ans».

Plus de transparence sur les émetteurs de téléphonie mobile

21 mars 2024 (mis à jour le 5 avril [note en bas d'article]) | Il aura fallu deux ans à Monsieur Valentin Tombez de la Radio télévision suisse (intimé) pour obtenir de l’Office fédéral de la communication (OFCOM) un accès à la base de données des antennes des émetteurs de téléphonie mobile des trois opérateurs, au nom du principe de transparence.
Tout a commencé le 3 mars 2021. Valentin Tombez a adressé une demande à propos des antennes de technologie 5G. L’autorité s’est adressée aux trois opérateurs, Sunrise GmbH, Salt Mobile SA et Swisscom (Suisse) SA (les recourantes) en leur offrant de prendre position au sujet des données qui pourraient être transmises. Par exemple le nom de la station, ses coordonnées, ses fréquences, sa puissance, l’azimut des faisceaux radio, les diagrammes d’antennes, la hauteur des antennes et l’altitude de la station. Détails ci-contre.
Les trois opérateurs ont pris position. S’en est suivi une procédure de médiation devant le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT) qui a recommandé à l’autorité inférieure d’accorder l’accès aux informations contenues dans les colonnes A et F à R de la base de données des antennes 5G, comme le demandait l’intimé.
L’autorité inférieure a accordé à l’intimé l’accès à un extrait des données d’exploitation de la banque de données, le contenu des colonnes A et F à R à l’état de mars 2021 pour la technologie 5G.
Après environ un an de procédure, en février 2022, les recourantes ont déposé un recours commun en vue de faire annuler la décision et d’obtenir un refus de divulgation des données.
S’en sont suivi différents échanges qui ont mené la procédure devant le Tribunal administratif fédéral. Qui s’est prononcé.
Les opérateurs ont contesté l’intérêt public à connaître les données des émetteurs
Pour tenter de faire annuler la décision, les recourantes ont largement argumenté.
D’abord que la divulgation des données d’exploitation de la banque de données des antennes serait contraire au sens et au but de la loi du 17 décembre 2004 sur la transparence (LTrans, RS 152.3). Elles ont également contesté un intérêt public. Elles ont fait valoir que la publication des données compromettrait la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse.
Et déclaré que «certains sites de téléphonie mobile auraient fait l’objet d’importants actes de vandalisme et de dégradation», et que la divulgation de toutes les données de localisation permettrait des attaques coordonnées à grande échelle. Elles ont évoqué les secrets d’affaires et déclaré que des concurrents pourraient entraver l’extension prévue du réseau au moyen de leur propre planification au moment de l’attribution des concessions. Et même que la divulgation de «données personnelles de tiers sont également concernées, notamment celles des propriétaires des sites, qui doivent s’attendre à des hostilités et à des actes de vandalisme supplémentaires».
La population a un grand besoin d’informations sur la technologie 5G
Le Tribunal administratif fédéral a estimé que la population a un grand besoin d’informations sur la technologie 5G qui suscite des questions et des craintes chez de nombreuses personnes depuis son introduction.
Il a rappelé que le besoin de plus de transparence et d’information est également reconnu par le Conseil fédéral et le Parlement, citant la réponse du Conseil fédéral du 26 mai 2021 à la question 21.1020 (les liens ouvrent un nouvel onglet) et la motion 20.3237 «Réseau de téléphonie mobile. Créer dès maintenant les conditions-cadres pour un déploiement rapide».
Il a relevé qu’une politique d’information transparente permet de contrer les craintes de la population à l’égard de la nouvelle technologie et de favoriser son acceptation, ce qui est dans l’intérêt des recourantes.
Les recours des opérateurs visant à empêcher l’intimé à avoir accès aux extraits de la banque de données des antennes est devenu ainsi sans objet et s’est vu rejeté. Les recourantes ont supporté les frais de la procédure et doivent allouer une indemnité à l’intimé. Les opérateurs n’ont pas déposé de recours auprès du Tribunal fédéral dans le délai prescrit.
Lundi 18 mars, j’ai demandé à recevoir le jeu complet et actuel des antennes de téléphonie mobile de tous les opérateurs. Je n’ai pas encore reçu de réponse ni d’accusé de réception.
Note du 5 avril: après quelques échanges de courriels, l'OFCOM m'a répondu qu'ils allaient consulter les opérateurs de téléphonie mobile en tant que tiers concernés et leur donner l'occasion de prendre position par rapport à ma demande.
Article en lien ci-dessous (de nouveaux onglets sont ouverts).

Quand un service cantonal des rayonnements veut induire la justice en erreur

26 février 2024 | Avant d’exploiter un émetteur de téléphonie mobile, l’opérateur est tenu de démontrer que deux limites différentes de l’ordonnance sur la protection contre les rayonnements non ionisants (ORNI) ne seront pas dépassées: la valeur limite d’immissions (VLI) et la valeur limite de l’installation (VLInst). Fixée en fonction de la fréquence, la première vaut environ 50 V/m et la seconde environ 5 V/m. Il ne sera pas question ici de la valeur limite de l’installation.
La valeur limite d’immissions doit être respectée partout où des personnes peuvent séjourner. On relie la valeur limite d’immissions au lieu de séjour momentané. Autour d’un émetteur, il existe un lieu le plus exposé. La constructrice doit calculer où se situe le lieu de séjour momentané le plus exposé, et s’assurer que la VLI d’environ 50 V/m ne sera pas dépassée. Le lieu de séjour momentané le plus exposé se trouve autour des antennes.
Pour cet article, des informations qui permettraient d’identifier la mise à l'enquête dont il est question sont tenues cachées car l’affaire est en cours. Il m’a semblé judicieux cependant de vous communiquer certains faits.
L’installation des antennes est prévue sur un toit plat. Elles seraient montées sur des mâts courts de sorte que les panneaux d’antenne seraient à peine plus hauts que la tête. La constructrice n’a pas prévu de clôture autour des antennes. Du personnel doit se rendre de temps en temps sur le toit pour entretenir des éléments propres au bâtiment.
Des antennes basses, mais pas de clôture sur une zone d’accès
Non seulement il serait possible de se tenir en face des panneaux d’antennes, mais de fait, dans le cadre de l’entretien d’équipements du bâtiment, des ouvriers devraient se tenir devant les antennes dans la direction principale de propagation du rayonnement. Donc, ils seraient exposés au rayonnement le plus intense qui soit.
Dans sa fiche, la constructrice a indiqué une VLI aux environs de 10 V/m, pour une limite à 50 V/m. Cependant, le point de calcul retenu se situe à l’arrière de deux antennes et latéralement à une autre où, selon les diagrammes, l’atténuation des ondes est la plus élevée.
J’ai été mandaté pour examiner la fiche. Dans mon analyse, j’ai contesté le choix du lieu de séjour momentané retenu par la constructrice situé dans une zone à forte atténuation du signal radio. J’ai contesté aussi l'intensité de la VLI calculée, disant qu’il serait possible de se trouver directement dans le faisceau radio, dans un champ électrique beaucoup plus élevé. J’ai contesté d’autres données que nous n’allons pas aborder, et j’ai fourni des calculs.
Puisque le service cantonal des rayonnements a validé la fiche de l’opérateur et par là même s’est porté garant de sa conformité à l’ORNI, et que je conteste cette conformité, le service cantonal des rayonnements a été entendu par le juge.
La personne représentant le service cantonal des rayonnements a affirmé au juge que le rayonnement électromagnétique ne serait pas plus élevé devant les antennes que là où il a été calculé par l’opérateur, et que même si tel était le cas, l’intensité serait encore inférieure à la VLI. Cette personne n’a remis aucun calcul au juge permettant de justifier son affirmation.
Par ailleurs, la personne a déclaré que son service n’effectue pas de nouveaux calculs, d’où il ressort que ce service cantonal des rayonnements ne confronte pas les données de la fiche avec d’autres lieux potentiellement plus exposés.
Le triple de la valeur limite d’immissions sur des zones d’entretien
Cette audition en justice a révélé deux choses. La première, que le représentant de l’instance cantonale s’est rallié à l’opinion de la constructrice sur la prétendue conformité de la fiche quant à l'intensité de la VLI et quant au choix du lieu le plus exposé. La seconde, qu’il ne voulait pas remettre en question le préavis positif de son service.
Devant la mauvaise fois manifeste du représentant de ce service cantonal, les calculs de rayonnement devant les antennes ont été déposés en justice. Ils montrent que l’intensité où le personnel affecté à l’entretien d’équipements de l’immeuble devrait se tenir vaut le triple de valeur limite d’immissions. L’exposition à de telles intensités présente des dangers pour la santé.
De mon point de vue, l’audition a révélé que ce service cantonal des rayonnements n’use pas de méthodes permettant d’obtenir ce qui est attendu de l’expertise d’un service cantonal spécialisé. En particulier, il ne montre pas un processus d’analyse standardisé et robuste. Ce service cantonal n’obtient pas ses valeurs prévisionnelles en les calculant selon les méthodes prescrites par les directives qui font foi, mais procède à des déductions au jugé qui l’ont mené à autoriser une configuration dangereuse.
Il y a un problème si l’autorité de contrôle refuse de voir une situation à l’évidence dangereuse
Nous faisons face à un problème sérieux. Acte un: l’opérateur de téléphonie mobile choisit de façon volontaire l’omission de moyens de sécurité (clôture) destinés à lutter contre les dangers scientifiquement prouvés et acceptés du rayonnement. Acte deux: l’instance de contrôle ne remarque pas un dépassement massif de la VLI, facile à déceler, au moment du dépôt de la fiche. Acte trois: pire encore, dûment alertée du fait par un avis scientifique durant le processus de mise à l’enquête, l’instance de contrôle maintient son préavis positif et nie le dépassement de l’intensité à un juge.
En conséquence de quoi il a été indiqué au juge que les préavis positifs concernant les fiches de données spécifiques au site des stations de base de téléphone mobile délivrées dans le canton où se produit cette affaire sont prononcés à partir d’éléments qui ne sont pas nécessairement représentatifs et que leur valeur scientifique est ténue.
Affaire à suivre.
Article en lien ci-dessous (de nouveaux onglets sont ouverts).

Élaboration d’un plan d’affectation communal: l’opérateur perd son recours

31 janvier 2024 | Une commune peut-elle refuser un permis de construire demandé par un opérateur de téléphonie mobile en se prévalant de la préparation d'un plan d’affectation communal en phase d’élaboration et ainsi non encore soumis à l’enquête publique et que le projet d’antenne compromettrait la modification de plan envisagée?
C’est à cette question que la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud a dû répondre.
Comme instruments possibles de planification des emplacements, le Tribunal fédéral a évoqué à diverses reprises la «planification négative», la «planification positive» et une réglementation à propos de l’évaluation des emplacements. Le concept définit donc des emplacements dans lesquels les installations de téléphonie mobile sont en principe interdites, des zones dans lesquelles elles sont en principe autorisées ou dans lesquelles elles dépendent d’une pesée d’intérêts ou d’autres conditions spéciales.
C’est presque l’unique possibilité pour une commune d’agir sur les lieux où seraient installées les antennes des stations de base, à la condition que le canton n’ait pas utilisé cet instrument et qu’il laisse une marge de manœuvre au droit communal. Pour une raison que je trouve étonnante, très peu de communes ne créent de planification ayant une capacité à influer sur les antennes, si bien que leur emplacement est à chaque fois décidé par les opérateurs.
Le tribunal fédéral dit en substance que si les objectifs du droit des télécommunications sont respectés, il est en principe possible de fixer des dispositions d’aménagement local servant des intérêts autres que ceux du droit environnemental, par exemple la préservation du caractère ou de la qualité d’habitat d’un quartier. Les antennes de téléphonie mobile peuvent rendre plus difficile la vente ou la location de certains immeubles et appartements et entraîner une pression sur le prix de vente ou le loyer. Ainsi, des prescriptions visant à réduire ou à canaliser les immissions de nature immatérielle dues à des installations de téléphonie mobile semblent possibles (ATF 133 II 321 [Günsberg], cons. 4.3.4).
Des prescriptions d’ordre esthétique ont donc de bonnes chances d’aboutir lorsqu’elles ne s’appliquent pas seulement aux installations de téléphonie mobile, mais s’intègrent dans une politique cohérente.
Venons-en à notre affaire.
Autoriser l'installation compromettrait la planification communale en cours
En 2020, une demande de permis de construire a été demandée pour une station de base de téléphonie mobile sur le territoire de la commune de C. Le projet a été mis à l’enquête publique l’année suivante et a suscité plusieurs oppositions. Selon la Centrale des autorisations en matière de construction, le projet aurait respecté les exigences de l’ordonnance du 23 décembre 1999 sur la protection contre le rayonnement non ionisant.
En 2023, la municipalité de C. a refusé de délivrer le permis de construire en se prévalant de son futur plan d’affectation communal, en phase d’élaboration. Son projet prévoit une planification négative des antennes de téléphonie aux alentours des lieux très densément habités et des écoles. La municipalité a proposé d’organiser une séance avec toutes les parties concernées afin de déterminer un autre emplacement plus adéquat. L’opérateur a recouru contre cette décision auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal. La commune a répondu par son dossier et a conclu au rejet du recours.
Les arguments faisaient notamment référence à l’article 47 de la Loi sur l’aménagement du territoire et les constructions (LATC, 700.11; ci-contre) qui dit en substance sous chiffre 1: «La municipalité peut refuser un permis de construire lorsqu’un projet de construction, bien que conforme, compromet une modification de plan envisagée, non encore soumise à l’enquête publique».* Cette disposition laisse une grande latitude de jugement et un pouvoir d’appréciation important à la municipalité, par exemple de délivrer le permis de construire alors même que le projet serait contraire à la réglementation future envisagée.
En l'état, le plan d’affectation communal laisse apparaître que l’installation litigieuse prévue à proximité d’une école pourrait se trouver à un emplacement où les antennes de téléphonie seraient prohibées. La délivrance du permis de construire serait dès lors de nature à compromettre la planification communale non encore soumise à l’enquête. Même si la planification n’est pas encore achevée –et que par conséquent l’étendue concrète de la planification négative n’est pas connue–, le tribunal a admis que la municipalité pouvait faire usage de l’art. 47 LATC.
Il a indiqué aussi qu’il est en principe possible que la planification locale édicte des prescriptions qui poursuivent d’autres intérêts que ceux de la protection de I'environnement tel que la préservation du caractère d’un quartier ou de la qualité de son habitat. Le tribunal a également rappelé que la commune a fait état de quatre emplacements alternatifs, deux étant proches du site initialement choisi.
Le tribunal a jugé le 30 janvier 2024 que la municipalité n’a pas violé le droit supérieur en examinant la possibilité de prévoir une planification négative dans sa zone à bâtir et n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en invoquant l’art. 47 LATC pour refuser l’autorisation de construire litigieuse. Débouté, l’opérateur est condamné au paiement d’un émolument, d’une indemnité de dépens en faveur de la commune et d’une autre indemnité de dépens en faveur des opposants. Il peut faire recours au Tribunal fédéral. Ses chances de l’emporter seraient toutefois très minces.
* ATF 1C_197/2009 du 28 août 2009 consid.5.1
Article en lien ci-dessous (de nouveaux onglets sont ouverts).

Arrêter les recherches pour ne pas savoir si le rayonnement des téléphones mobiles a un impact biologique

25 janvier 2024 | Le National Toxicology Program (NTP) est le premier laboratoire gouvernemental américain à effectuer des essais sur les produits pharmaceutiques, les substances chimiques et les rayonnements. C'est le seul organisme fédéral qui effectue des programmes de recherche sur les rayonnements.
Revenons en arrière. En 2016, les chercheurs du National Toxicology Program (NTP) étaient prêts à publier les résultats de leurs recherches sur l’exposition d'animaux aux rayonnements de téléphonie mobile 2G et 3G. L’étude avait commencé environ huit ans plus tôt et son budget avoisinait les 30 millions de dollars.
C’est alors que l’industrie des télécommunications a insisté —le mot est faible— pour que les conclusions de l’étude soient examinées avec une extrême minutie, à un point qui n’avait jamais été atteint auparavant.
Devra Davis, Ph. D., MPH, est une toxicologue et épidémiologiste qui a siégé au Conseil scientifique du NTP lors de son lancement dans les années 1980. Elle a écrit ou coécrit plus de 200 articles évalués par des pairs qui ont paru dans des revues comme The Lancet ou encore le Journal of the American Medical Association. Elle a déclaré «aucun autre composé ou substance [étudié par le NTP] n’a jamais fait l’objet d’un tel examen par les pairs».
Finalement, un groupe d’experts s’est réuni trois en jours en mars 2018 pour examiner l’étude et ses conclusions. Ils ont conclu que les preuves étaient si solides qu’ils ont recommandé au NTP de reclasser un niveau de preuve d’activité cancérogène de «certaines preuves» à «preuves évidentes».
Le rapport du NTP dit qu’il existe une «preuve claire d’une association avec des tumeurs dans le cœur de rats mâles» (schwannomes malins) lorsqu’ils étaient exposés à des niveaux de rayonnement radio similaires à ceux émis par les téléphones cellulaires 2G et 3G, «quelques preuves d’une association avec des tumeurs dans le cerveau de rats mâles» (gliomes malins) et «quelques signes d’association avec des tumeurs dans les glandes surrénales de rats mâles».
Dans un suivi, le NTP a précisé que l'exposition était liée à une augmentation significative des dommages à l'ADN dans le cortex frontal du cerveau et dans l'hippocampe de souris mâles, et dans les cellules sanguines de souris femelles. De nombreux facteurs influençant les conséquences d'un dommage à l'ADN et notamment le risque de tumeur, le NTP avait prévu d'autres études.
Les résultats du NTP ne sont pas assimilables aux technologies 4G ou 5G.
Pour être précis, l'intensité du rayonnement était comprise entre 1,5 et 6 watts par kilogramme de poids corporel chez les rats et de 2,5 à 10 watts par kilogramme chez les souris.
Le 89 % des téléphones mobiles testés en conditions réelles en 2015  dépassait la limite légale de DAS de 2 W/kg. Un quart d’entre eux dépassait 4 W/kg. Quelques modèles atteignaient 7 W/kg. À l'heure où j'écris ces lignes, la puissance de plusieurs dizaines de modèles dépasse les limites européennes. Malgré cette situation anormale, le Conseil fédéral a indiqué en décembre 2023 ne pas vouloir faire contrôler la puissance des téléphones mobiles.
En février 2023, Devra Davis et ses collègues ont publié une analyse de plus de 200 études établissant un lien entre l’exposition au rayonnement d’appareils sans fil et des effets biologiques négatifs. Parmi ceux-ci, le stress oxydatif et les lésions de l’ADN, la cancérogénicité, la cardiomyopathie, les lésions du sperme, les lésions de la mémoire et d’autres effets neurologiques.
Le NTP poursuivait quatre programmes de recherche liés aux rayonnements :
  • sur le comportement et le stress,
  • une surveillance physiologique dont l’évaluation de la fréquence cardiaque,
  • sur la participation éventuelle de l’échauffement aux effets,
  • le risque de dommages à l’ADN.
Annonce que le NTP renonce à poursuivre ses travaux sur les rayonnements
En janvier 2024, les chercheurs expérimentaient un nouveau système d’exposition in vivo pour des études avec des rongeurs. C’est alors que le NTP a mis à jour une fiche d’information disant qu’il renonce à poursuivre ses travaux parce que «la recherche était techniquement difficile et nécessitait plus de ressources que prévu». Un acte incompréhensible entraîné par la décision du gouvernement américain de mettre un terme au financement des recherches sur les risques du rayonnement des téléphones mobiles.
Les arguments avancés par une agence gouvernementale selon lesquels il peut faire des économies parce que les travaux sur des équipements employés au quotidien par des centaines de millions de personnes sont «techniquement difficiles» et «gourmands en ressources» ne constituent pas une décision responsable.
Il faut comprendre que le gouvernement américain n’entend pas chercher à protéger sa population contre les effets éventuels des rayonnements provenant d’équipements 5G, alors qu’il existe par exemple de plus en plus de preuves de liens entre l’exposition provoquée par le smartphone dans la poche et la baisse de la fertilité masculine.
Le NTP n’a rien indiqué de ce qu'il adviendrait des recherches en cours.
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