réponse des médecins à l'exposition aux rayonnements - Pierre Dubochet

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Réponse des médecins à l'exposition aux rayonnements

© Pierre Dubochet, ing. radio
toxicologie des RNI
conflit d'intérêts : aucun avec cet article
23 mars 2020 (sur la page d'accueil)
14 juin 2022 (mis en nouvelle page et mis à jour)
De la difficulté pour le patient de bien se faire comprendre du médecin
Lecture : 4 min 30 | 1410 mots
Notre société définit que la tâche de résoudre les problèmes de santé revient d’abord au médecin. Dès que des symptômes deviennent invalidants, la consultation d’un médecin qui maîtrise le sujet peut être judicieuse. Il est important d'agir dès que les symptômes risquent d'entraver le quotidien, car «l'EHS [intolérance aux RNI] [...] semble être associée à un état pathologique neurologique irréversible, requérant une prévention persistante à l'encontre de ces facteurs environnementaux» (Belpomme & Irigaray 2020).
Une ancienne étude informe que le 69% des médecins suisses a été consulté pour des symptômes reliés aux  rayonnements dans les 12 mois précédant l’enquête (Huss et Röösli 2006). Le sujet qui s’est construit, à la suite de longues observations, la conviction d’être devenu intolérant au rayonnement non ionisant (IRNI) s’efforce de mettre en évidence la réalité des symptômes afin de faire reconnaître sa situation. La relation médecin-patient peut alors devenir inconfortable. Avant tout, la manière dont un individu ressent des symptômes, les nomme, les interprète tient pour partie à son parcours professionnel, social et à d’autres ressources discursives. Cela rend les patients inégaux durant la consultation.
Le temps d’une consultation habituelle joue en défaveur de la personne affectée par les rayonnements. Le patient manque de temps pour communiquer les informations sur son expérience d'atteinte autodéclarée qui autoriserait un diagnostic satisfaisant. Afin de pouvoir approfondir un peu mieux les possibilités de diagnostic et le dispositif thérapeutique à mettre en place, une consultation plus longue —d'un coût plus élevé— est souvent acceptée du point de vue des patients. Quant au médecin généraliste, la difficulté d’accès aux données scientifiques probantes sur les effets des RNI lui rend la tâche complexe. Le résultat de la consultation pourrait bien être hasardeux si l'on en croit les auteurs d’un questionnaire rempli par 600 médecins généralistes français: leur savoir est assez proche de celui de la population générale: «insuffisant» (Lambrozo et coll. 2012). Les principales sources documentaires des médecins sont les médias grand public (75%), une part restante provient d’articles scientifiques.

Afin de pouvoir approfondir un peu mieux les possibilités de diagnostic et le dispositif thérapeutique à mettre en place, une consultation plus longue — d'un coût plus élevé — est souvent acceptée du point de vue des patients.

OMS : l'exposition peut «provoquer une forme distincte de maladie»
Une autre source d'information des médecins est l'OMS. Une publication de 2005 de «l’EFM project» de l’OMS (le département qui s’occupe des rayonnements à l’OMS) a semé le doute sur les effets des rayonnements. Tout en reconnaissant «un problème handicapant pour l’individu touché», l’OMS rejetait le lien du RNI, spéculait sur une origine psychologique avec un parti pris pour l’effet nocebo. Par effet nocebo est entendu que le sujet attribue un effet pathogène à l’exposition qu’il redoute. Il s’agit de l’antithèse de l’effet placebo.
L'OMS est ainsi la première institution a avoir spéculé sur les effets des rayonnements qui proviendraient d'une angoisse. Spéculé, puisque l'effet nocebo n’explique en aucun cas l’origine du déclenchement symptomatique par une source d’électrosmog ni l’existence de symptômes causés par l’exposition réelle à l’insu du sujet chez une partie des sujets affectés. Du reste, les recommandations officielles de traitement par psychothérapie n’ont pas été significativement utiles. Celles pour les médicaments, préjudiciables (Hagstrom et coll. 2013; Hagstrom et coll. 2012).
Il y a presque un demi-siècle, l'OMS reconnaissait que l'exposition aux microondes pouvait «provoquer une forme distincte de maladie» (OMS 1973). L’OMS signalait ultérieurement «que l’exposition professionnelle aux microondes provoquait l’apparition de troubles du système nerveux central et du système nerveux autonome, des syndromes asthéniques et divers autres effets chroniques. [...] Les symptômes dont font état les personnes exposées consistent en céphalées, irritabilité, troubles du sommeil, asthénie, baisse de l’activité sexuelle (affaiblissement de la libido), douleurs thoraciques et sentiment général de mauvaise santé mal défini.» (OMS 1981). Il n’existe aucune mention d’effet nocebo dans toute la littérature antérieure aux années 2000.
Les médecins sensibilisés aux pathologies environnementales s'en sortent mieux
La perception du risque des sujets IRNI par le médecin dépend encore de divers facteurs (âge, sexe,  mode d’exercice, au fait qu’il se sente suffisamment informé, qu’il pense que les pouvoirs publics sont attentifs, etc.) (Lambrozo et coll.  2013; Kowall et coll. 2010; Huss and Roosli 2006; Leitgeb, Schrottner et Bohm 2005). Les médecins sensibilisés aux pathologies environnementales lors de leurs études s'en sortent un peu mieux, de même que les praticiens en médecines alternatives et complémentaires, pour autant que leur pratique évolue avec les nouvelles données.
Un peu plus de la moitié des médecins généralistes estime plausible l’association entre certains symptômes et les RNI (Hagstrom et coll.  2012; Huss et Röösli 2006). Une recherche sur une intolérance et d’autres problèmes de santé liés aux RNI sera en grande partie basée sur une anamnèse détaillée, en se centrant en particulier sur les corrélations entre les problèmes de santé et leur survenue dans le temps, les lieux et les circonstances de l’exposition aux RNI, ainsi que l’évolution des symptômes dans le temps et la susceptibilité individuelle.
Par ailleurs, toute autre éventuelle cause doit être éliminée autant que possible. Deux tiers des médecins suisses utilisant des outils thérapeutiques complémentaires choisissent la réduction d’exposition comme outil principal (Ausfeld-Hafter et coll. 2006). C'est là que j'interviens efficacement.
J'identifie les sources de RNI potentielles dans l’environnement, dont on sait qu’elles ont des effets sanitaires potentiellement préjudiciables. L'étude citée plus haut relève que plus des trois quarts des sujets interrogés disent que la réduction des RNI a contribué à leur rétablissement complet ou partiel. Mon intervention a également pour objectif de vous aider à mieux évaluer les situations à risque et à vous encourager à une stratégie d’évitement efficace.  En même temps, il sera possible de déterminer les expositions qui n'ont pas ou peu d'effet sanitaire, afin de vous éviter de vous focaliser dessus, ce qui n'est pas souhaitable.
Estimation et si nécessaire, mesurage des rayonnements
L’évaluation de l’exposition à certains RNI peut être déterminée par le questionnaire disponible en lien ci-dessous. Peu importe si le patient soupçonne ou non l’exposition aux RNI en tant que cause, ces questions devraient être utilisées pour évaluer le niveau d’exposition; au moins comme estimation.
Il est important de savoir que seuls certains RNI peuvent être évalués au moyen de questions. Par exemple, la proximité de lampes fluocompactes, d’une station de base DECT, d’un routeur Wi-Fi, et dans une moindre mesure, d’un smartphone.
L’évaluation d’autres types d’expositions, par exemple générés par des sites d’émetteurs de haute fréquence, les champs électriques ou magnétiques générés par le câblage dans les parois (spécialement dans les constructions en bois) ou les lignes à haute / très haute tension, un onduleur solaire, une borne de recharge automobile nécessitent des mesures, car elle varie fortement dans une zone donnée.
En principe, le médecin devrait poser des questions pour évaluer l’exposition aux RNI à la maison et au travail, en gardant à l’esprit que l’intensité du RNI peut varier selon les moments.
Sont intéressants également les facteurs de variation de la symptomatologie dans le temps, les antécédents sur l’alimentation, sur l’habitat, l’analyse des copies des résultats de biologie et des comptes-rendus des consultations médicales spécialisées, y compris ceux antérieurs à  l’apparition des symptômes, la prescription de bilans urinaire et sanguin, ainsi que des prélèvements de bouche et de selles en vue d’une recherche microbiologique (analyse cytobactériologique, recherche de Candida albicans et autres levures; recherche de parasites uniquement dans les selles).
Un traitement adapté pour soulager des symptômes pénibles peut sembler approprié. Cependant, le médecin traitant doit savoir que la réduction des symptômes ne met pas le patient à l’abri du risque du RNI. À long terme, l’exposition peut provoquer des dommages neurologiques, dégrader significativement la qualité de vie et pourrait causer ou favoriser le cancer. Cette réalité nécessite une explication objective au patient des risques associés à l’exposition. Sans réduction simultanée de l’exposition environnementale et sans coaching de mode de vie, le traitement des symptômes peut se révéler contre-productif sur le long terme.
Les Médecins en faveur de l'Environnement ont publié leur Charte sur les rayonnements le 25 juin 2000. Téléchargez la Charte des Médecins en faveur de l'Environnement.
Ces publications complèteront utilement votre savoir :
Références:
    • Ausfeld-Hafter et coll. Komplementärmedizin. Eine  Fragebogenerhebung in schweizerischen Arztpraxen mit  komplementärmedizinischem Diagnostik-und Therapieangebot. Studie im  Auftrag vom Bundesamt für Umwelt. Universitat Bern. Kollegiale Instanz  für Komplementärmedizin (KIKOM) [Internet]. Bern (CH): Bundesamt für  Umwelt. 2006 Oct 5.
    • Belpomme D. et Irigaray P., 2020,  L'électrohypersensibilité  en  tant  qu'affection neurologique  nouvellement identifiée et caractérisée : comment en faire le  diagnostic, la traiter et la prévenir, Int. J. Mol. Sci. 2020, 21(6),  1915.
    • Hagstrom et coll. Electromagnetic hypersensitive Finns: symptoms, perceived sources and treatments, a questionnaire study.
    • Pathophysiology 2013;20(2):117-22.
    • Hagstrom  et coll. Reducing electromagnetic irradiation and fields alleviates  experienced health hazards of VDU work. Pathophysiology 2012;19(2):81-7.
    • Huss.  A. et Röösli M., 2006. «Consultations in primary care for symptoms  attributed to electromagnetic fields – A survey among general  practitioners.» BMC Public Health 6. doi: 10.1186/1471-2458-6-267.
    • Lambrozo  et coll. Les médecins généralistes français face aux champs  électromagnétiques. La Presse médicale, 42 (5). doi : 10.1016/j.lpm 2012  09.026.
    • OMS. Critères d’hygiène de l’environnement 16, Fréquences et hyperfréquences, OMS, 1981: 90.
    • OMS. Biologics effects and health hazards of microwave radiation, International symposium, Warsaw, 1973: 261
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