Intolérance aux rayonnements: le Conseil d’État du canton de Vaud use de façon répétée de données scientifiquement inexactes (1e partie)
Lente élévation de l’intensité de fond, augmentation du nombre de sources, multiplication des fréquences, accroissement des largeurs de bande: tout ceci concourt à augmenter le rayonnement à haute fréquence. Certaines personnes présentant une tolérance réduite à l’électrosmog sont discriminées. Par ailleurs, dans un déclin de l’état de santé général, l’épuisement retient l’attention. Appelé à introduire des zones à faible rayonnement, le Conseil d’État du canton de Vaud désinforme.
Illustration ci-dessus: ma photographie d'une pièce d'un appartement protégé des rayonnements.
SOMMAIRE
© Pierre Dubochet, ing. radio
toxicologie des RNI
conflit d'intérêts : aucun avec cet article
28 janvier 2025
EHS: le Conseil d’État du canton de Vaud désinforme
Lecture : 11 min | 3410 mots (article en deux parties, part. 1 | part. 2)
L’automne passé, Sabine Glauser Krug a rédigé l’interpellation Personnes électrohypersensibles, sacrifiées au nom du progrès — quelles solutions? (24_INT_129) à l’attention du Conseil d’État du canton de Vaud. Son interpellation a fait l’objet d’une brève de ma part (ouvre un nouvel onglet) le 17 octobre 2024.
Ma brève se termine ainsi: «On attend de voir si les sujets affectés par les rayonnements artificiels continueront d’être des citoyens de seconde zone, à qui l’on répond que la science n’a rien prouvé, que les limites actuelles protègent des effets des expositions, et que la recherche doit continuer». Nous allons pouvoir cocher, dans la réponse du Conseil d’État du canton de Vaud, l’usage oui/non des trois poncifs trompeurs les plus éculés servant à se dérober à ses obligations.
Lire aussi ma brève: Intolérance aux rayonnements : le Conseil d’État du canton de Vaud débite des menteries (ouvre un nouvel onglet)
Les personnes qui déclarent être affectées par les rayonnements sont classées par la médecine environnementale dans la population sensible. Tableau ci-dessous.
la population sensible |
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[EUROPAEM 2016] |
Une forme distincte de maladie professionnelle selon l’OMS
Madame la présidente du Conseil d’État Christelle Luisier Brodard et Monsieur le Chancelier du Conseil d’État Michel Staffoni ont adopté un texte de réponse en séance du 27 novembre 2024 à Lausanne. Quelques extraits sont examinés ici. Selon le Conseil d’État du canton de Vaud «En 2004, l’OMS a classé l’EHS dans la famille des intolérances environnementales idiopathiques (IEI), c’est-à-dire sans explication ni cause connue»
Mon commentaire : le document de 2004 de l’OMS, publié par un département («le EMF-project») financé et capturé par des groupes industriels qui participent à la rédaction de documents de critères sur les risques des rayonnements [1] [2] est facile à remettre en cause.
D’une, il contredit les documents antérieurs de l’OMS, de deux son contenu ignore l’approche causale qui constitue la réponse la plus adaptée à donner dans le traitement d’un risque environnemental complexe, de trois il confond troubles fonctionnels et sensitivité.
L’OMS écrit en 2005 que, quelle qu’en soit la cause, la situation peut constituer un problème invalidant pour l’individu touché. Un hygiéniste peut identifier les facteurs témoins présents dans l’environnement dont on sait qu’ils ont des effets sanitaires préjudiciables pouvant toucher le patient.[3] Mais surtout, l’OMS écrit en 1974 [4] que l’exposition au rayonnement non ionisant est à même de provoquer «des symptômes caractéristiques complexes. C’est une forme distincte de maladie professionnelle» à propos de laquelle elle précise en 1981 qu’elle incorpore céphalées, fatigue, vertiges, asthénie, troubles du sommeil, confusion, le tout conduisant à un «sentiment général de mauvaise santé mal défini».[5]
Ce qui correspond pour l'essentiel aux symptômes des personnes qui déclarent être affectées par les rayonnements.
Selon le Conseil d’État du canton de Vaud «en l’état actuel des connaissances, il n’existe pas de preuves solides permettant d’établir un lien de causalité entre l’exposition aux champs électromagnétiques et les symptômes décrits par ces personnes».
Mon commentaire : le Conseil d’État du canton de Vaud se trompe. Outre les références à l’OMS ci-dessus, l’exposition de l’ambassade américaine à Moscou révélée par le Los Angeles Times du 7 février 1976, l’action de la guilde des journaux au Congrès américain en 1981 au moment de l’introduction des microordinateurs, les atteintes au système nerveux de plusieurs dizaines d’employés d’une filiale d’Ericsson à la fin des années 1980,* les études successives sur l’émetteur de Schwarzenburg publiées en 1995, pour n'en citer que quelques-unes, établissent le lien entre symptômes et exposition au rayonnement. Ces faits constituent autant d’exemples de preuves solides.
*Ils ont contribué à répandre les normes MPR1/MPR2, puis le label de certification TCO pour les écrans d’ordinateur, à l’époque le TCO’ 92.
En sus, l’équipe interdisciplinaire suisse[6] qui a examiné d’un point de vue médical, psychologique, psychiatrique et environnemental des sujets qui attribuent des problèmes de santé à des pollutions environnementales a jugé plausible l’effet des radiofréquences supérieures à 0,6 V/m quand les participants y étaient astreints plusieurs heures par jour. Une étude du gouvernement hollandais en double aveugle met en évidence des effets sur la mémorisation sous rayonnement 3G à 1 V/m. [35]
Dans les années 1950, une personne sur cinquante affectée aux technologies à microondes pour des compagnies de téléphone, de radio, de télévision, de radars a dû mettre un terme à sa carrière professionnelle en raison de symptômes.
S’agissant de l’usage des trois poncifs trompeurs les plus éculés, le premier étant «la science n’a rien prouvé», notons un premier «oui», le gouvernement du canton de Vaud s’en est servi pour se dérober à ses obligations.

Effet nocebo, horloge circadienne et terrain migraineux
Selon le Conseil d’État «Des mécanismes, tels que l’effet nocebo (apparition d’effets indésirables, d’origine surtout psychologique, due à la perception négative d’une antenne par exemple), le dysfonctionnement de l’horloge circadienne et un terrain migraineux sont également évoqués. Il n’existe pas non plus de critères validés ou de mesures qui permettraient de poser un tel diagnostic».
Mon commentaire : quand il se hasarde à considérer les symptômes comme psychogènes, le Conseil d’État remet en question la capacité humaine à identifier une atteinte environnementale discernée par ses récepteurs de réactions nocives. Sans cette qualité, l’Homme aurait disparu de la surface de la Terre. Le rapport du consensus scientifique international reconnaît que la pathologie est organique et non psychologique. «Les problèmes psychologiques associés à la personne atteinte d’EHS étaient secondaires à l’apparition de la maladie».[7]
J’ai signalé plus haut que l’OMS a relié l’exposition chronique aux rayonnements aux troubles du sommeil. Aucune, aucune preuve solide ne corrobore la toute récente théorie du terrain migraineux comme mécanisme de l’intolérance aux rayonnements (ma brève «Prévalence de la maladie migraineuse chez les patients électrohypersensibles» - ouvre un nouvel onglet).
L'existence de personnes phobiques aux ondes ne remet pas en cause le fait que des personnes ont une faible tolérance des rayonnements.
Diverses recherches ont mis en évidence des symptômes invalidants lors de l’exposition au rayonnement non ionisant, y compris dans des circonstances où une population, ou des travailleurs, ignoraient être exposés. Nous disposons de preuves au-delà de tout doute raisonnable.
Des normes afin de protéger la population
Selon le Conseil d’État parlant des opérateurs de télécommunications «Les autorités fédérales ont adopté des normes strictes, parmi les plus sévères au monde, concernant les immissions de RNI afin de protéger la population».
Mon commentaire : La justification d’un émetteur est d’exciter des fréquences électromagnétiques dans l’environnement par une émission polarisée —inexistante à l’état naturel— en vue de servir un intérêt économique. En 1999, la Berne fédérale a introduit des valeurs limites fixées «compte tenu d’expériences ou de prévisions quant aux possibilités économiquement supportables de réduire le rayonnement par des moyens techniques et relevant de l’exploitation»,[8] c’est-à-dire «les mesures de limitation des émissions qui sont acceptables pour une entreprise moyenne, économiquement saine».[9] Les sociétés anonymes que sont les opérateurs poursuivent un unique but: générer du profit.
Les mesures de limitation des émissions préventives en Suisse permettent d'offrir un rendement moyen du dividende de plus de quatre pour cent par an, en sus de dégager des milliards de francs, comme le montre l'acquisition de Vodafone Italia S.p.A par Swisscom pour quelque 7,6 milliards de francs dans un rachat finalisé le 31 décembre 2024, qui place l'opérateur suisse second fournisseur de télécommunications en Italie.
Le plus important opérateur de télécommunications est aux mains de la Confédération, qui choisit l’intensité des valeurs limites. Le conflit d’intérêts est manifeste.
La défense d’intérêts est criante quand l’OFEFP/OFEV écrit dans le rapport explicatif ORNI de 1999 «N’a pas été pris en compte non plus le résultat de l’étude épidémiologique faite aux alentours de l’émetteur à ondes courtes de Schwarzenburg montrant que des perturbations du sommeil se multiplient à partir d’une exposition nocturne moyenne égale à environ 0,4 V/m».[10] Plus exactement, plusieurs études ont eu lieu, auxquelles elle a participé, confirmant les résultats en double aveugle.
Il est prouvé que l'OFEV fait donc fi d'une gestion qui tient compte de l'état de la science et de l'expérience, elle fait même fi de sa science et de son expérience!
La valeur limite de l'installation pour les ondes courtes a été fixée à 3 V/m (annexe 1 art.74 let.b ORNI), soit 7,5 fois plus haute que celle qui montre une multiplication des perturbations du sommeil. Preuve, Mesdames et Messieurs du gouvernement du canton de Vaud, que cette limite ne protège pas la population.
La publication de SwissNIS 2024 confirme que la protection de la santé de la population est assurée
Selon le Conseil d’État du canton de Vaud «Les résultats de cette dernière publication [le rapport de mesure de SwissNIS 2024, lire ma brève Rapport annuel 2024 de SwissNIS: +30% de radiofréquences en 2 ans, ouvre un nouvel onglet] s’alignent sur la situation des années précédentes et confirment que la protection de la santé de la population est assurée. L’exposition au RNI se situe nettement en dessous de la valeur limite d’exposition».
Le Conseil d’État du canton de Vaud se trompe. Au passage, qu’il se serve d’une publication dont le chef de projet adjoint a été dénoncé en 2020 par 23 experts internationaux comme ayant un «historique de conflits d’intérêts et de fraude scientifique» et qu’il soit suggéré que cette personne soit libérée de ses fonctions dans les rayonnements,[11] n’est pas le meilleur choix. D’autant plus qu’à cette situation inédite s’est ajouté une publication de 2024 de l’intéressé[12] ayant fait l’objet d’une demande de rétractation par deux groupes de chercheurs séparés,[13][14] car le lecteur «risque d’être induit en erreur» avec des erreurs «suffisamment graves», «il ne s’agit pas d’erreurs fortuites».
En l’absence de toute preuve scientifique, prétendre que les valeurs limites applicables aux antennes de téléphonie mobile offriraient une protection de la santé de la population relève de la foi. J’encourage le gouvernement du canton de Vaud à plus de rationalité.
Le choix de certaines valeurs limites n'a pas rendu l'exposition plus sûre. Les intensités choisies semblent plutôt la solution visant à empêcher tout contre-narratif scientifique, quel qu'il soit, à la fois dans une stratégie d'augmenter le taux de rentabilité économique, tout en faisant obstacle au voisinage décidé à agir légalement en cas d'atteinte.
Exemple maintenant avec la valeur limite de l'installation en haute tension.
La VLInst retenue en 1999 pour les lignes de transport du courant est de 1 µT (annexe 1 art.14 ORNI). En 1992 était démontrée une relation dose-réponse pour la leucémie infantile avec un risque multiplié par trois avec 0,2 µT et multiplié par quatre avec 0,3 µT;[15] résultats similaires trois ans plus tard,[16] corroborés par d’autres études en 2000. Une métaanalse incluant 38 études en 2022[17] confirme le risque dès 0,4 µT. Comme celle pour les ondes courtes, cette VLInst est non conforme au droit supérieur au moment même de son introduction. Sa réduction n’est pas à l’ordre du jour. Une nouvelle fois, preuve est faite que la santé peut être en danger malgré le respect de la VLInst, Mesdames et Messieurs du Conseil d'État du canton de Vaud.
Ne m'en veuillez pas d'être méticuleux, s'il vous plaît. Il n'existe pas de «valeur limite d’exposition» ainsi que le note le Conseil d'État. Il existe des valeurs limites d'immissions (VLI) et des valeurs limites de l'installation (VLInst). Les auteurs du rapport de mesure de SwissNIS 2024 déclarent que «les valeurs mesurées sont nettement inférieures aux valeurs limites d'immissions» (p.78). Évidemment! La VLI n'est dépassée qu'à quelques mètres d'une antenne émettant entre mille et trois mille watts. Toute mesure à 50m ou plus d'une station de téléphonie mobile ne peut qu'être nettement inférieure à la VLI.
La lettre de janvier 2021 de BERENIS [télécharger] —que le Conseil d’État du canton de Vaud ne peut ignorer— indique que «dans la gamme des valeurs limites de l’installation» les études fournissent des indications de stress oxydatif accru, ce qui peut provoquer à long terme des dégâts oxydatifs si la situation se prolonge. «Il est donc fort possible que la santé des individus souffrant [par exemple de diabète ou de maladies neurodégénératives préexistantes] soit touchée plus sévèrement» suffit à elle seule à démontrer que la protection de la santé de la population n’est pas assurée par la valeur limite de l'installation.
La population générale est protégée, non pas par des valeurs limites «économiquement supportables» aux perturbateurs (!), mais par la loi fondamentale de la Suisse: la Constitution fédérale de la Confédération suisse. Le peuple et les cantons suisses «déterminés à vivre ensemble leurs diversités dans le respect de l’autre et l’équité» disposent que tout être humain a droit à «l’intégrité physique et psychique» (art.10 al.2) que le législateur a protégé également par l’article 28 du Code civil et par l’article 328 du Code des obligations relativement à la personnalité du travailleur.
La personnalité —au sens des qualités individuelles qui distingue une personne des autres individus — est un droit défensif absolu opposable à tous et qui s’étend, sans s’y limiter, aux droits de la personnalité physique, aux droits de la personnalité psychique, aux droits de la personnalité sociale et aux droits de la personnalité économique. Ces droits ressortent de l’interpellation de Sabine Glauser Krug.
S’agissant de l’usage des trois poncifs trompeurs les plus éculés servant à se dérober à ses obligations, le second étant «les limites actuelles protègent des effets des expositions», notons un second «oui», le gouvernement du canton de Vaud s’en est servi pour se dérober à ses obligations, bien que cette affirmation relève de la foi si nous parlons des émetteurs et soit à l’évidence fausse s’agissant du transport du courant et des émetteurs à ondes courtes.
Les preuves sur l’efficacité des protections ne sont pas solides
Selon le Conseil d’État du canton de Vaud «Concernant les moyens de protection contre ce type de rayonnement, l’ANSES (Agence nationale française de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a publié en mars 2018 les résultats d’une expertise sur l’hypersensibilité aux ondes électromagnétiques. Ce rapport a notamment conclu que «les preuves sur l’efficacité des différents dispositifs de protection disponibles sur le marché n’étaient pas solides».
Mon commentaire : qu’il est décevant de lire que le gouvernement du canton de Vaud ignore l’existence de compétences éprouvées en Suisse pour la réalisation de lieux de vie offrant une exposition non significative ou faiblement significative au rayonnement électrique à basse fréquence et aux radiofréquences (ma photographie en tête d’article), y compris à une centaine de mètres d’une station de téléphonie mobile! Un blindage est à même de réduire la puissance des hautes fréquences de six mille fois et plus (38 dB).
Lisons la page 359 du rapport de l’ANSES auquel se fie le gouvernement du canton de Vaud: «Concernant l’étude de l’hypersensibilité, le groupe de travail recommande d’utiliser le questionnaire validé d’Aron and Aron (1997) pour caractériser le degré d’hypersensibilité (comme trait de caractère) des personnes se déclarant EHS».
Ci-dessous quelques questions:
Figure 1. Quelques questions extraites du questionnaire du psychothérapeute Aron.
Il semble difficile de donner une preuve plus convaincante que les auteurs au savoir orienté en psychologie ne sont d’aucune aide sur les effets physiologiques des rayonnements. Ce que démontre la science.[18] Le besoin de connaître la dosimétrie a été signalé par l’OMS en 1981.[19] Des psychothérapeutes se croient légitimés à commenter les plaintes des personnes exposées, sans dosimétrie effectuée par un expert qualifié! Ceci relève à mon sens des pseudosciences. Preuve est faite que l’ANSES mécomprend le sujet qu’elle prétend résoudre. Ce faisant, elle aggrave le problème.
Question 2 de l’interpellation Sabine Glauser Krug : Quelles mesures le Conseil d’État a-t-il prises ou entend-il prendre pour veiller à préserver ou mettre en place des lieux compatibles avec la recherche, le logement des personnes EHS et/ou des lieux publics de récupération?
Réponse du Conseil d’État : «L’absence de preuves scientifiques établissant un lien entre les RNI et les symptômes ressentis par les personnes électrosensibles, l’hétérogénéité des expositions au rayonnement identifié comme étant problématique et la complexité de la mise en œuvre des mesures de protection suggérées sans preuve de leur efficacité ne permettent pas de justifier une intervention spécifique de la part du Canton allant dans ce sens».
Mon commentaire : je ne peux pas croire que Madame la Présidente du Conseil d’État Christelle Luisier Brodard et Monsieur le Chancelier du Conseil d’État Michel Staffoni ignorent les travaux du physicien britannique Michael Faraday. En 1836, s’inspirant des observations d’Henry Cavendish, de Charles-Augustin Coulomb et de Benjamin Franklin, Faraday a posé le principe fondateur du blindage en mettant au point la cage qui porte son nom, qui veut qu’une enceinte conductrice soit étanche aux champs électriques.
Quelle que soit l’hétérogénéité des expositions aux rayonnements identifiés comme étant à risques, les experts sans conflit d’intérêts savent agir avec des moyens éprouvés depuis près de 190 ans.
Question 3 de l’interpellation de Sabine Glauser Krug : Quels moyens à sa disposition le Conseil d’État serait-il enclin à utiliser pour encourager l’autorisation des zones blanches par les instances fédérales?
Réponse du Conseil d’État : «À ce jour, les connaissances scientifiques ne permettent pas de mettre en évidence la preuve objectivant l’efficacité des zones blanches (zones du territoire non exposées au rayonnement non ionisant) dans la réduction des symptômes chez les personnes se déclarant souffrir d’EHS. Cela s’applique également aux zones qui seraient exposées à un RNI plus faible, du moment qu’aucune relation dose-réponse n’a été mise en évidence».
Mon commentaire : comment est-il possible que le gouvernement du canton de Vaud soit si mal renseigné? La littérature spécialisée indique avec constance dès les années 1960 que soustraire le patient à l’exposition suffit pour obtenir une normalisation complète avec restitutio in integrum de toutes ses fonctions, pour autant que les rayonnements n'aient pas provoqué d'atteinte grave. À l’inverse, la persistance de l’exposition augmente la prévalence d’une phase de dépression de diverses fonctions menant à une détérioration progressive plus ou moins importante de l’état fonctionnel du personnel exposé.[20][21][22]
L’exposition chronique aux radiofréquences du voisinage de l’émetteur de Schwarzenburg augmente les cas de nervosité, de fatigue et de difficulté à maintenir le sommeil par rapport aux témoins. La nette progression de la prévalence de cas entre 0,3 et 0,94 V/m d’exposition moyenne[23] prouve la relation dose-réponse au-delà de tout doute raisonnable (figure 2 ci-dessous). L’effet-dose est également relevé pour le cancer.[24]

Figure 2. «Les insomnies et les douleurs articulaires ont montré une relation dose-réponse même après correction pour l’âge, le sexe, l’attribution au danger potentiel de l’émetteur et la période de temps passé dans la même maison» (p.69).
En atténuant les radiofréquences et en conduisant le champ électrique à la terre, les matériaux de blindage assurent une qualité de vie décente aux occupants.
À croire le gouvernement du canton de Vaud, le principe de la cage de Faraday n’aurait pas fait preuve de son efficacité… Auteur des premières théories sur les lignes de force électromagnétiques, celui qui a donné son nom à de multiples lois et phénomènes dans les domaines d’électrochimie et d’électromagnétisme, à l’unité de capacité électrique, Michael Faraday a dû se retourner dans sa tombe au cimetière de Highgate à Londres.
Répondre aux cas d’intolérance aux rayonnements pourrait «compromettre les intérêts de l’ensemble de la population»
La réponse du Conseil d’État indique 19 consultations d’un médecin-conseil de MedNIS entre le 17 octobre et le 31 décembre 2023. Répondre aux besoins de quelques dizaines de cas représente non seulement des défis «à grande échelle»(!) mais —je cite ad litteram le Conseil d’État— serait de nature à «compromettre les intérêts de l’ensemble de la population».
Comparons ces quelques dizaines de cas avec ceux de la maladie d’Alzheimer. Sur les 120’000 cas environ recensés en Suisse, à peu près 7’700 ont un âge compris entre la fin de la trentaine et 64 ans. La maladie d’Alzheimer est responsable de 60 à 80% des cas de démence dans le monde. Les patients subissent de tels pertes de mémoire, de changements de personnalité et de comportement que la maladie représente l’une des principales causes d’invalidité et de dépendance des personnes âgées dans le monde. Les conséquences émotionnelles, psychologiques, psychosociales et financières sont singulièrement lourdes tant pour les personnes touchées que pour leurs proches. Son coût économique mondial était de 1,3 million de millions de dollars américains en 2019.
Multifactorielle, la maladie d’Alzheimer implique le mode de vie et les facteurs environnementaux. Aucun test biochimique ne la diagnostique à lui seul. Les mesures biochimiques et l’imagerie peuvent être utilisées pour reconnaître avec précision la démence due à la maladie d’Alzheimer. Mais l’accessibilité des ressources et leur coût freinent leur utilisation. Les options de traitement sont limitées. On continue la recherche de traitements contre l’Alzheimer —287 millions de dollars en 2021 rien qu’aux États-Unis— quoique ces vingt dernières années se résument à 99,6% de taux d’échec.
Quel contraste entre notre société qui s’engage sans compter en faveur des sujets atteints de la maladie d’Alzheimer malgré des traitements médicaux au mieux inefficaces —au pire aggravant leur état— et l’avis de Madame la présidente du Conseil d’État Christelle Luisier Brodard et de Monsieur le Chancelier du Conseil d’État Michel Staffoni qui n’ont cure de quelques dizaines de sujets à la trajectoire de vie professionnelle et sociale brisée, malgré la disponibilité de solutions éprouvées.
Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que j’évoque la maladie d’Alzheimer: une métaanalyse l’associe significativement à l’exposition prolongée aux rayonnements de basse ou d’extrêmement basse fréquence.[25] Ne pas s’occuper d’eux aujourd’hui pourrait en faire des charges autrement plus lourdes demain.
Un «suivi médical adapté»? Quel suivi médical?
À lire dans la deuxième partie.
Également abordé: La santé des Suisses se dégrade: quelle part de causalité des ondes?
Et: La population demande la promotion de mesures de santé pour les jeunes.
Lire aussi dans les brèves de 2025: Intolérance aux rayonnements: le Conseil d’État du canton de Vaud débite des menteries
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Ces publications complèteront utilement votre savoir :
Références:
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- Microwave News, 1er octobre 2005.
- WHO (World Health Organization). Electromagnetic Fields and Public Health, Electromagnetic Hypersensitivity; WHO Fact Sheet No. 296, Geneva, Switzerland, 2005.
- Biologic effects and health hazards of microwave radiation, Proceedings of an International Symposium, Warsaw, 15-18 Oct., 1973; WHO (OMS), The US Department of Health, Education and Welfare, and The Scientific Council to the Minister of Health and Social Welfare; Poland, Éditions médicales polonaises, 1974, p. 261.
- Fréquences radioélectriques et hyperfréquences, 16e cahier de la série Critères d’hygiène de l’environnement, OMS, 1981, p.69-90.
- Huss A, Kuchenhoff J, Bircher A, Niederer M, Tremp J, et al. Elektromagnetische Felder und Gesundheitsbelastungen - Interdisziplinare Fallabklärungen im Rahmen eines umwelt-mediznischen Beratungsprojektes. Umweltmed Forsch Prax 2005 ; 10 (1) : 21-8.
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- Comment allez-vous ? Comment la Suisse gère la maladie et la santé, L’étude sur la santé CSS 2024, par Sotomo.
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