Incidents de santé anormaux (1/2)
Les agences fédérales américaines sont confrontées à des «incidents de santé anormaux» affectant le personnel du gouvernement américain de symptômes «authentiques et convaincants». Certains employés ont subi des lésions cérébrales apparentées à celles dues à une onde de choc d’explosion. Il est presque certain que des cas sont liés à des rayonnements pulsés à haute fréquence.
Des successions d’impulsions électromagnétiques à même de dégrader l’état de santé pourraient ne laisser aucune preuve physique persistante. Il y a de plus en plus d’indices qui tendent à démontrer que les rayonnements peuvent entraîner des circonstances préjudicielles non indemnisables en raison d’une construction juridique défaillante liée à l’administration de la preuve.
SOMMAIRE
© Pierre Dubochet, ing. radio
toxicologie des RNI
conflit d'intérêts : aucun avec cet article
29 avril 2024
«C’était vraiment effrayant»
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Mise en garde: les personnes anxieuses à propos des rayonnements sont invitées de ne pas entamer la lecture de cette page.
Marc Polymeropoulos, chef adjoint des opérations clandestines, est à Moscou en décembre 2017 dans le cadre de discussions bilatérales avec ses homologues du service fédéral de sécurité de la Fédération de Russie. Il dort dans sa chambre d’hôtel. «Je me suis réveillé au milieu de la nuit avec des vertiges extrêmes, une migraine insoutenable et des oreilles qui sifflaient. Vous savez, j’ai été en Irak, en Afghanistan, je me suis fait tirer dessus. Mais ça, c’était vraiment effrayant». L’officier supérieur évoque un épisode jamais perçu auparavant. Quelques jours plus tard, les mêmes sensations le saisissent, ce qui écarte une intoxication alimentaire. Vertiges. Bourdonnement assourdissant. Incapable de se mouvoir, Polymeropoulos reste cloîtré trente-six heures dans sa chambre d’hôtel. De retour aux USA, l’agent du renseignement souffre d’un «brouillard cérébral», sent ses capacités cognitives en déclin progressif.
Des maux de tête incessants et une perte de vision de loin l’ont contraint à prendre sa retraite en été 2019. On lui a diagnostiqué un traumatisme crânien léger. Mais il a dû affronter une longue lutte avant d’obtenir des soins médicaux appropriés, son employeur entre autres doutant de la nature de sa maladie. L’ancien officier a souligné les «souffrances inutiles» qu’il a endurées parce que l’agence ne lui a pas apporté le soutien dont il estimait avoir besoin dans l’immédiat. Deux autres responsables du Département d’État qui ont subi des attaques similaires ont tenu le même discours.
«Je me suis réveillé au milieu de la nuit avec des vertiges extrêmes, une migraine insoutenable et des oreilles qui sifflaient. Vous savez, j’ai été en Irak, en Afghanistan, je me suis fait tirer dessus. Mais ça, c’était vraiment effrayant»
Un fonctionnaire de la Maison-Blanche signale une «attaque invisible» en 2019 alors qu’il promenait son chien dans une banlieue de Virginie, juste à l’extérieur de Washington. Un autre incident mystérieux se produit en novembre 2020 près de The Ellipse, la grande pelouse ovale du côté sud de la Maison-Blanche. Une fonctionnaire du Conseil national de sécurité a été victime de la mystérieuse méthode qui l’a rendue malade. Tous deux ont rapporté des bruits dans les oreilles, des vertiges, des maux de tête violents et des nausées. La fonctionnaire a cité de graves douleurs au système auditif: «imaginez que vous prenez un crayon bien aiguisé et que vous piquez vos tympans».
Malgré que les personnes chargées de l’enquête ne soient pas parvenues à des conclusions claires, le fait que ce second incident mystérieux ait eu lieu si près de la Maison-Blanche a mis les autorités chargées de la sécurité sur les dents. Ce ne sont que deux cas d’une longue série dans le monde.
Centre de l’équilibre de l’oreille interne perturbé
Autre incident encore. Carrie —son nom reste confidentiel— agent du FBI décrit le moment où elle est frappée d’une force paralysante invisible. «C’était cette sensation quand le dentiste amène sa fraise tout près de votre tympan, multipliée par dix. C’était comme un bruit de forage aigu». Elle se trouve dans sa buanderie. «Mon oreille droite était en ligne de mire avec une fenêtre pendant que cette chose se passait dans mon oreille. Quand je me suis penchée en avant, ça m’a en quelque sorte, ça ne m’a pas renversé, mais ça m’a fait tomber en avant». Ceci indique que le centre de l’équilibre de l’oreille interne a été perturbé. Puis «la douleur a commencé à se propager de l’intérieur de mon oreille droite, à ma mâchoire, à mon cou et à ma poitrine». Finalement, Carrie s’évanouit sur un canapé.
Les mois suivants, elle se souvient s’être plainte à ses collègues d’avoir la maladie d’Alzheimer précoce. Ses souvenirs sont confus, sa mémoire à court terme perturbée. En marchant vite, elle peine à franchir un cadre de porte tant car ses trajectoires sont devenues imprécises. Une victime américaine stationnée en Allemagne commente: «c’est une forme de terrorisme. Ça cause des blessures graves qui ont changé la vie de certains d’entre nous».
Des chercheurs de l’université de Pennsylvanie évoquent en 2019 ce qui ressemble à une «commotion cérébrale persistante». Un patient d’un centre médical militaire national américain a indiqué avoir reçu un diagnostic de lésion cérébrale similaire à celle observée chez une personne exposée à une onde de choc d’explosion.
Des effets des champs électromagnétiques pulsés plausibles
Aux États-Unis, les affaires d’atteinte à la santé provoquées par des rayonnements sont étouffées au moins depuis les années 1960. Cependant, de possibles cas sur des diplomates, des militaires et des agents des renseignements américains se sont multipliés cette dernière décennie. Francfort en 2014, Cuba en 2016 —qui a fait connaître ces incidents sous le nom de «syndrome de La Havane»— également à Guangzhou en Chine, Washington, Miami et ailleurs aux États-Unis, en Australie, Ouzbékistan, Géorgie, Pologne, Vienne, Berlin, Vietnam, Colombie, Londres, Taïwan, Genève, Paris… Des personnes touchées ont signalé l’apparition aiguë de symptômes à la suite de sensations physiques anormales. Tous les cas ne sont pas comparables.
Les ministères et agences se sont réunis des dizaines de fois. Ont examiné plus de mille documents classifiés. La directionnalité des atteintes est un signe qui exclut des agents biologiques ou chimiques. Malgré l’existence de lacunes, certains responsables jugent plausibles des effets des champs électromagnétiques pulsés qui traversent la plupart des matériaux de construction, en fonction entre autres d’un rapport de 2020 de l’Académie nationale des sciences des États-Unis. Les auteurs notent : «Cette constellation de caractéristiques cliniques est différente de tout trouble dans la littérature neurologique ou médicale générale».
Plus de cent personnes touchées déclarent une série de symptômes : acouphènes très intenses, perte d’audition, troubles de la vision, vertiges, trouble de l’équilibre, diminution des capacités cognitives, énormes maux de tête, irritabilité, fatigue, insomnies. Le tout semblant venir de nulle part. Une partie subit des troubles persistants inexpliqués, certains encore trois ans plus tard : troubles de la mémoire, douleurs aux oreilles, troubles de l’équilibre, maux de tête, etc.
La littérature indique que des expositions intenses à des rayonnements à haute fréquence très brefs peuvent produire des effets neurologiques. Alan Frey, qui a publié plusieurs documents dans les années 1960 sur l’effet qui porte son nom et qui décrit la «perception sonore» dans le crâne ou à l’arrière du crâne de signaux pulsés à haute fréquence a indiqué aux enquêteurs fédéraux «c’est une explication parfaitement viable».
Des équipements conçus pour dégrader l’état de santé sans laisser de trace?
Selon Greg Edgreen chargé de l’enquête pour le compte de la Defense Intelligence Agency, seuls les meilleurs officiers sont atteints. Certains ont été démis de leurs fonctions en raison de lésions cérébrales. Dans le cadre de l’émission «60 minutes» diffusée par le réseau de télévision CBS, Edgreen considère qu’ils ont été «neutralisés». Il a aussi dit que le Pentagone a placé la barre de la preuve «incroyablement haute». Car ces affaires ouvrent une boîte de Pandore : est-il encore possible de protéger la population américaine contre une telle arme furtive ? La question est justifiée pour la population, dans le monde entier.
Greg Edgreen a pris sa retraite de l’armée pour créer une structure d’aide aux victimes avec l’espoir de programmes de traitement gouvernementaux.
Il existe des indices probants que la sécurité des individus peut être compromise par des équipements conçus pour dégrader l’état de santé sans laisser de trace.
Des brevets ont été déposés aux États-Unis comme celui développé «pour injecter des signaux intelligibles chez des personnes bien entendantes, mais en contournant les organes auditifs humains normaux» au moyen de salves d’impulsions électromagnétiques. Les microondes pulsées déclenchent des ondes de pression dans le tissu cérébral. Les vibrations atteignent les récepteurs sonores de l’oreille interne à travers la structure osseuse, stimulant ainsi directement les cellules nerveuses des voies auditives. Selon les réglages, l’effet empêche la communication auditive ou provoque des douleurs. Les fréquences entre 1 à 2,5 GHz sont les plus efficaces. Un historique s’impose.
Armes électromagnétiques antipersonnel puissantes et révolutionnaires
En 1982, un magazine technique de l’Air Force indique la conception d’armes électromagnétiques comme «tendances militaires antipersonnel puissantes et révolutionnaires» émettant des microondes transportables dans un gros camion. L’exploitation de semiconducteurs au nitrure de gallium bouleverse la donne dans les années 1990. Sa susceptibilité moindre à la chaleur et son efficacité énergétique largement supérieure au silicium sont à l’origine d’émetteurs compacts beaucoup plus puissants.
Un dispositif conçu pour provoquer des symptômes n’émet qu’une toute petite partie du temps. Des saccades d’impulsions parfois aussi courtes qu’un millionième de seconde, voire moins. Disons entre 10 nanosecondes à 1 microseconde. Une nanoseconde égale un milliardième de seconde. Durant ce temps, l’onde parcourt environ 30 centimètres. L’arrivée de l’impulsion dans les tissus humains génère une onde de pression qui suit une certaine propagation. Intense, elle endommage les tissus mous.
Une recherche des années 1970 indique que les sujets entendent les impulsions individuelles comme des clics indépendants et séparés. En deçà de 50 µs (microsecondes), les impulsions provoquent des séries de sons aigus; des craquements au-delà de 100 µs. La perception des microondes dépend de la perception auditive des hautes fréquences. Ceci explique les différences de perception des signaux à haute fréquence des individus touchés.
La Direction du renseignement et de la sécurité de l’armée américaine a publié en 1998 un rapport longtemps gardé secret sur des systèmes dont «les besoins en énergie ne sont pas élevés» conçus pour associer «des impulsions de forte puissance de durée extrêmement courte». Objectif: modifier des propriétés membranaires du cerveau en vue d’entraîner une dépolarisation, une décharge en rafale ainsi qu’une désynchronisation des fonctions cérébrales de certains neurones. Les conséquences «peuvent différer d’une modalité d’exposition à une autre», mais comptent des influences du système moteur, des troubles auditifs et oculaires ainsi que des nausées.
En 2004, le programme Navy SBIR pour le gouvernement américain fait état de la mise au point d’un prototype portatif avec lequel «il est possible d’élever la sensation auditive au niveau de l’inconfort, de dissuader le personnel de pénétrer dans un périmètre protégé ou, si nécessaire, de mettre temporairement hors d’état de nuire». L’efficacité du système a été prouvée expérimentalement. Il est alors établi que des troubles peuvent être décidés par le réglage de fréquences et de temps d’impulsion spécifiques.
À faire peur. L’usage de ces équipements, sans garantie aucune d’absence de graves effets invalidants ultérieurs, soulève de sérieux problèmes d’éthique. D’où la discrétion à leur sujet.
Miniaturisation des équipements incapacitants
Selon les circonstances, une impulsion électromagnétique à haute fréquence d’environ 550 V/m déclenche des effets audibles. À titre de référence, la limite autour des antennes d’une station de base de téléphonie mobile est de l’ordre d’environ 50 à 60 V/m, selon la fréquence. Avec une antenne directionnelle qui propage le rayonnement sur un angle de 30°, on obtient un champ électrique continu de 550 V/m à 4 m de distance avec un émetteur de 5100 W, par exemple dans la chambre d’hôtel voisine. En utilisant une antenne directionnelle de 4° d’angle, on obtient 550 V/m dans une zone d’environ 11 m2 à 50 m de distance avec 12,6 kW; à 100 mètres, 50 kW englobent une zone d’environ 45 m2.
Puisque l’émetteur ne transmet qu’une partie du temps, l’énergie n’est que de dix pour cent pour un émetteur transmettant chaque seconde, disons, deux mille impulsions de 50µs entrecoupées de pauses de 450µs. Les puissances d’émission sont alors respectivement de 500 W, de 1260 W et de 5 kW. Quand bien même il s’agirait d’obtenir des champs plus élevés que 550 V/m, un système à portée réduite transportable à défaut d’être portatif peut être mis en œuvre depuis une chambre d’hôtel voisine. L’émetteur et des batteries à l’oxyde de lithium-nickel-cobalt-aluminium alimentant un système ayant besoin de quelques kilowatts de puissance prennent place dans une ou deux valises. Un dispositif doté d’une portée d’une centaine de mètres voyage à l’insu de tous dans un discret véhicule, par exemple une camionnette, qui disparaît une fois le forfait accompli.
Des systèmes provoquant des sensations physiques anormales sont une réalité. La presse relate des actes contre des diplomates, des militaires, des agents des renseignements américains. Et demain? Des personnalités politiques, des industriels, des journalistes?
Dans la deuxième partie à venir, nous verrons les réactions de la communauté du renseignement américain confrontée aux premiers rayonnements, de probables cas de maladie de Parkinson après une exposition aiguë, le résultat des études récentes, la persistance des symptômes.
Ceci nous conduira dans un troisième temps au point central: le défi de rapporter la preuve d’une atteinte invisible. Nous quitterons la branche des agents du renseignement, puisque toute personne qui se sent diminuée par des rayonnements non ionisants bien plus ordinaires doit faire face au problème de rapporter la preuve de l'atteinte.
Ces publications complèteront utilement votre savoir :
1: Les rayonnements ionisants, les agents chimiques et biologiques, les infrasons, les sons audibles, les ultrasons propagés sur de grandes distances et l’élévation massive de température par énergie électromagnétique forment tous des explications peu plausibles ou sont irréalisables sous l’angle technique ou pratique.